Cet article vous est offert
Pour lire gratuitement cet article réservé aux abonnés, connectez-vous
Vous n'êtes pas inscrit sur Le Monde ?

Ukraine : "L'intégration européenne est notre objectif stratégique"

Le ministre des affaires étrangères, Leonid Kojara, estime qu'en cas de non-signature de l'accord d'association avec l'UE, le pays "manquerait une occasion historique unique".

Propos recueillis par  (Jérusalem, correspondant)

Publié le 07 juin 2013 à 17h39, modifié le 07 juin 2013 à 17h39

Temps de Lecture 4 min.

Le ministre ukrainien des affaires étrangères, Leonid Kojara, à Helsinki, le 28 mai.

Le temps presse pour l'Ukraine. Si Kiev veut obtenir la signature d'un accord d'association et de libre échange avec l'Union européenne (UE), il lui faut donner des gages en matière d'État de droit. Notamment en libérant Ioulia Timochenko, l'ancienne première ministre. Fin novembre, un sommet du Partenariat oriental déterminant aura lieu à Vilnius. Dans un entretien au Monde, le ministre des affaires étrangères, Leonid Kojara, explique la position de son pays.

Quelles sont les chances de signer l'accord d'association et de libre échange avec l'UE en novembre ?

Leonid Kojara : J'espère qu'il sera signé. Dans le pire des cas, on manquerait une occasion historique unique. En 2014 auront lieu les élections européennes, l'attention sera ailleurs. En 2015, ce seront les élections présidentielles en Ukraine. L'UE ne voudra pas offrir un tel avantage à l'un des candidats. Ensuite, c'est le brouillard. En cas d'échec cette année, le terme d'espace post-soviétique continuerait d'exister, au lieu de permettre à l'Ukraine d'en sortir. On en pâtirait, l'UE aussi. Je l'ai dit à M.Fabius : pour la France, l'accord signifierait des milliers d'emplois, avec la fin des tarifs douaniers et l'ouverture de notre marché de 46 millions de personnes.

La libération de Ioulia Timochenko, emprisonnée depuis août 2011, est une condition posée par des membres de l'UE pour signer l'accord d'association. Etes-vous prêt à sacrifier ce rendez-vous pour la garder en détention ?

Le Monde Application
La Matinale du Monde
Chaque matin, retrouvez notre sélection de 20 articles à ne pas manquer
Télécharger l’application

Cette affaire ne peut être résolue par des moyens politiques. L'an dernier, le Parlement européen a adopté une résolution sur l'Ukraine où il nous appelait à libérer Timochenko "sans conditions". Cette résolution, initiée par la droite européenne, réclamait une solution politique. Ce n'est pas possible ! On ne peut pas dire qu'il y a une justice sélective en Ukraine, puis nous demander d'ignorer la loi !

Le grand problème de Ioulia Timochenko est son refus de coopérer avec les services d'enquête. Si elle avait choisi une défense juridique, je pense que la décision du tribunal [qui l'a condamnée à sept ans de prison pour "abus de pouvoir"] aurait été différente. Aujourd'hui encore, elle mobilise ses partisans, elle réclame sa libération et menace de nous mettre en prison le jour où elle prendra le pouvoir. Toutes les procédures ne sont pas finies. Après la décision de la Cour européenne des droits de l'homme [qui a rendu un avis sévère sur l'arrestation illégale de Mme Timochenko et son traitement judiciaire], on a encore deux mois pour faire appel. Pour l'heure, il n'y a pas eu de décision de prise.

Mais pourquoi ne pas la gracier, comme son ancien ministre, Iouri Loutsenko ?

La grâce n'est pas une décision politique mais juridique. Pour Loutsenko, il y avait une demande de son épouse et de la Défenseur des droits. Timochenko refuse de signer une demande de grâce. Le président Ianoukovitch ne peut donc prendre cette mesure.

L'Ukraine a obtenu, fin mai, un statut d'observateur au sein de l'Union douanière, composée de la Russie, de la Biélorussie et du Kazakhstan. Quel est l'intérêt pour Kiev ?

Pour l'Ukraine, l'essentiel n'est pas d'intégrer l'Union douanière, mais d'éviter de se désintégrer. Nos secteurs stratégiques restent très intégrés dans l'économie de l'Union. Les avions Antonov sont produits à 50 % en Ukraine, le reste l'étant en Russie, au Kazakhstan et en Ouzbékistan. Cela concerne aussi l'industrie spatiale, avec des programmes communs, ou la coopération dans l'industrie militaire.

Nous avons souhaité, dès le départ, que l'Union adopte un format 3+1, avec un statut d'observateur pour l'Ukraine. Nous voulons absolument savoir ce qu'il s'y passe. La Russie était sceptique, ce genre de statut n'étant pas prévu dans les 240 accords déjà conclus. Au bout de deux ans de négociations, nous l'avons obtenu. Ce statut ne contredit pas nos engagements devant l'Union européenne.

Mais s'agit-il du premier pas vers l'intégration dans une Union eurasienne ?

Ça peut l'être, ou pas. Pour le moment, on exclut cette possibilité. Nous avons pris des engagements. L'intégration européenne figure dans la législation ukrainienne, c'est notre objectif stratégique. Mais le statut d'observateur nous permet de participer à tous les organes de l'Union douanière, sans droit de vote, avec la possibilité de s'exprimer. Nous en avons informé nos partenaires européens. Nous n'avons pas entendu d'objections.

Mais vous continuez, en somme, à jouer Bruxelles contre Moscou, ou le contraire, en fonction du moment...

C'est un jeu de balancier, c'est vrai. Il y a eu énormément de déclarations de dirigeants russes nous invitant à rejoindre l'Union douanière. Mais cela ne signifie pas que l'Ukraine exerce un chantage vis-à-vis de l'UE. Nous ne faisons que suivre nos intérêts nationaux. Nous nous devons d'entretenir de bonnes relations avec l'UE comme avec la Russie. L'Allemagne est son premier partenaire dans l'UE. Leurs échanges s'élevaient, en 2011, à 80 milliards de dollars [60,4 milliards d'euros]. Suivait l'Italie avec 50 milliards de dollars. Nous étions à 57 milliards. Cela veut dire que l'Ukraine est réellement importante pour la Russie, et pas seulement le contraire.

L’espace des contributions est réservé aux abonnés.
Abonnez-vous pour accéder à cet espace d’échange et contribuer à la discussion.
S’abonner

Voir les contributions

Réutiliser ce contenu

Lecture du Monde en cours sur un autre appareil.

Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil à la fois

Ce message s’affichera sur l’autre appareil.

  • Parce qu’une autre personne (ou vous) est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil.

    Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil à la fois (ordinateur, téléphone ou tablette).

  • Comment ne plus voir ce message ?

    En cliquant sur «  » et en vous assurant que vous êtes la seule personne à consulter Le Monde avec ce compte.

  • Que se passera-t-il si vous continuez à lire ici ?

    Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connecté avec ce compte.

  • Y a-t-il d’autres limites ?

    Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant à des moments différents.

  • Vous ignorez qui est l’autre personne ?

    Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe.

Lecture restreinte

Votre abonnement n’autorise pas la lecture de cet article

Pour plus d’informations, merci de contacter notre service commercial.