En montrant les femmes en blouse blanche qui assemblent, huit heures par jour, des circuits imprimés destinés à être expédiés dans toute l’Europe, le cadre de l’usine Videoton, à Székesfehérvár, à une heure au sud de Budapest, est laudateur. « Elles sont les seules à pouvoir faire ces tâches répétitives, les hommes ne tiennent pas le coup. » Mais il a actuellement un gros problème :
« C’est typiquement le type de main-d’œuvre qui préfère partir faire le ménage en Autriche ou en Allemagne pour gagner plus. »
Chez Videoton, on verse le smic hongrois : à peine 110 000 forints par mois (356 euros). A moins de 200 kilomètres, l’Autriche recrute n’importe quel serveur pour au moins trois fois plus. Résultat : Videoton cherche actuellement plus de 200 employés. « Et le chômage aux alentours est quasiment de 0 %… »
La situation de ce sous-traitant automobile est loin d’être unique. « Dans tout le pays, nous avons des clients qui doivent fermer leurs lignes de montage faute de main-d’œuvre », se désespère Zoltan Czellecz, directeur du développement de l’agence d’intérim Randstad en Hongrie. Celle-ci affiche « entre 500 et 700 offres » non pourvues et il ne cesse de demander à ses clients d’augmenter les salaires ou de proposer des logements pour retenir leurs travailleurs. Environ 400 000 Hongrois, soit 10 % de la population active, travaillent actuellement en Europe de l’Ouest. Et 100 000 à 150 000 de plus sont des travailleurs frontaliers qui se rendent chaque jour en Autriche ou en Slovaquie.
Avec un chômage de 4,9 % et une démographie en berne depuis plusieurs décennies, la Hongrie est en situation de plein-emploi dans plusieurs régions et certaines entreprises menacent de stopper leurs investissements. Environ 50 000 postes ne seraient pas pourvus dans le pays. Même McDonald’s doit louer des appartements à Budapest pour offrir l’hébergement à certains de ses serveurs !
Face à cette situation, le Medef hongrois, le Mgyosz, a publié en juin une liste de revendications qui a fait beaucoup de bruit. Intitulée « propositions pour gérer la pénurie de main-d’œuvre critique en Hongrie », elle suggère notamment « l’introduction d’un programme gouvernemental pour attirer de la main-d’œuvre qualifiée » de l’étranger. Si le patronat précise bien qu’il s’agit uniquement d’attirer des gens « capables de s’intégrer culturellement », il a ouvert un débat inédit sur l’immigration.
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